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Bordeaux la vie matérielle et on s’y entend mieux que partout ailleurs. »

— « Messieurs, leur ai-je dit, le goût des arts peut vous manquer, mais je rencontre l’ancienne qualité française : la franchise, et une absence d’hypocrisie que peut-être je chercherais en vain dans toutes les autres grandes villes de France. »

Malgré le temps pluvieux, je suis allé en fiacre au bout de la ville voir la chartreuse de Saint-Bruno et le cimetière. Bordeaux n’a aucune rue peut-être aussi laide que beaucoup de rues de Rouen et de Lyon. Les rues de cette ville anglaise sont toujours suffisamment larges. Dans les quartiers pauvres les maisons n’ont qu’un premier, et enfin, en approchant des extrémités, qu’un rez-de-chaussée.

Saint-Bruno, grande salle carré long comme un jeu de paume, laquelle est recouverte d’un énorme toit en ardoises ; la façade est du genre italien ridicule, à la mode vers 1650, car alors il arriva à l’architecture italienne de tomber dans le style des lettres de M. Dupaty sur l’Italie.

Saint-Bruno donc n’a qu’une nef, revêtue jusqu’à douze pieds de haut, d’une boiserie fort élégante et bien vernie. Le fond de cette vaste salle est revêtu de marbres de diverses couleurs, pilastres, colonnes et mauvaise sculpture. Tout cela