Page:Sterne - Œuvres complètes, t1-2, 1803, Bastien.djvu/381

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CHAPITRE XIV.

Un rien nous déconcerte.


C’est une chose qui n’a jamais été facile sous aucun règne, à moins que vous ne soyez aussi mince et aussi fluet que moi, que de forcer votre main à traverser diagonalement tout votre corps pour fouiller dans le fond de votre poche opposée : mais en 1718, lorsque cette aventure arriva, cela étoit très-difficile. — Mon père, qui s’obstina au succès dans cette occasion, fut nécessairement obligé de faire faire à ses bras une espèce de zigzag qui auroit frappé les yeux les moins clairvoyans. Jugez s’il échappa à mon oncle Tobie qui en avoit tant vu ! tous les zigzag de la porte saint-Nicolas lui revinrent sur le champ à l’esprit. — Un clou, dit-on, chasse l’autre, et les zigzag chassèrent aussitôt de son idée le sujet actuel de la conversation. Il ne songea plus qu’au siége de Namur, et déjà il sonnoit Trim pour lui dire d’aller chercher son plan, son compas et son secteur, afin de mesurer les angles de retour des traverses de l’attaque, et singulièrement celui où il avoit eu l’honneur de recevoir sa blessure dans l’aine…