Page:Sterne - Œuvres complètes, t1-2, 1803, Bastien.djvu/44

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et s’échauffèrent de l’enthousiasme sublime de la morale orientale.

Elle me sembloit être malheureuse ; et cela ajouta à mon estime pour elle. Je devinai, plutôt que je ne lui demandai, son histoire ; elle sentoit et ne murmuroit pas. Le fiel ne bouilloit pas en elle ; un chyle balsamique couloit toujours dans ses veines.

Pendant son séjour en Angleterre, cette douce communication ne fut jamais interrompue ; à son départ une correspondance amicale lui succéda : elle partit, et ce fut pour toujours. Je ne la rencontrerai plus… dans ce monde… Elle étoit, hélas ! la femme d’un autre.

La femme d’un autre ! et qu’avois-je besoin de faire cette confession ? La réforme du christianisme a déchiré cette pratique de notre rituel. J’eus beau dire qu’elle m’appela dans toutes ses détresses, que je la secourus autant qu’il fut en moi, que je la servis, que ces considérations mettoient absolument hors de mon pouvoir tout projet de séduction, quand j’aurois été assez libertin pour en former ; ces excuses ne furent pas admises ; on me repliqua toujours : elle étoit la femme d’un autre.

Les femmes seront donc traitées désormais comme une reine d’Espagne. S’il arrive