Page:Sterne - Œuvres complètes, t1-2, 1803, Bastien.djvu/565

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Diable !… dit mon oncle, s’il entendoit aussi bien l’attaque et la défense, il falloit, sans doute, aussi qu’il fût ingénieur….

N’en doutez pas, dit mon père en levant le pied pour descendre la seconde marche.

Prenez garde ! dit mon oncle Tobie, vous allez tomber.

Mon père, en effet, chancela si fort que mon oncle Tobie n’eut pas cette crainte sans raison.

Heureusement, frère Tobie, dit mon père, que je me suis retenu. J’avois perdu l’équilibre. C’est faute de m’être rappelé de quel pied je suis parti pour venir jusqu’ici. Vous ne sauriez croire combien il est utile de s’en souvenir. Aristote, qui a fort amplement traité de cette matière, n’a pu la résoudre, et l’a rejettée dans ses problêmes.

L’utilité m’en a paru si frappante que je l’ai approfondie. Que l’on voit bien là toute la prévoyance de la nature dans tout ce qu’elle a fait ! si nous jetons les yeux sur l’homme, sur les animaux, sur les oiseaux, sur les insectes, nous trouvons en chaque classe une uniformité parfaite dans les agens qu’elle leur a donnés pour marcher. Ils ont plus de pieds les uns que les autres : mais si l’homme n’en a pas plus que les dindons, on n’en voit