Page:Sterne - Œuvres complètes, t1-2, 1803, Bastien.djvu/75

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et former en nous-mêmes un plan de conduite d’après l’aspect des manières, des erreurs, des vertus des nations que nous aurons observées. Voilà une partie de la cargaison que nous devons importer chez nous.

La folie de nos jeunes gens ne leur est pas aussi profitable, et le tableau des voyages de l’enfant prodigue est plus à présent une copie qu’un original. C’est bien assez qu’un pareil aventurier, s’évadant sans compas, sans carte, sans boussole, sans instructions, ne se soit pas égaré pour toujours, et qu’il revienne frapper à la maison paternelle couvert de haillons.

Que racontera-t-il aux parens, que le bruit de son retour aura attroupés dans la maison de son père ?

Les fêtes et les banquets qu’il aura donnés aux jolies femmes et aux petits-maîtres asiatiques ; le prix des mets, et la manière ingénieuse et coûteuse dont les cuisiniers les apprêtent ; le luxe de ses concerts ; les flûtes, les harpes, les sacbutes qu’il payoit ; la magnificence de la cour des rois de Perse ; le nombre de leurs esclaves, de leurs chars, de leurs chevaux et de leurs palais ; la beauté de leurs maîtresses.

Il ne dira pas comment il fut trompé à