Page:Sterne - Œuvres complètes, t3-4, 1803, Bastien.djvu/481

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ensemble, mon oncle Tobie préféra de ne rien dire ; et le caporal acheva son histoire.

« Tom, s’apercevant qu’il gagnoit un peu de terrein, et que tout ce qu’il avoit dit sur les saucisses avoit été bien reçu de la belle, se hasarda à lui offrir de l’aider un peu. D’abord il prit l’entonnoir, et le tint, pendant que la veuve avec son pouce faisoit entrer la viande dans le boyau ; ensuite il coupa des attaches de longueur convenable, et les tint dans sa main pendant qu’elle les prenoit une à une ; — après cela il les mit dans la bouche de la veuve, où elle pouvoit les prendre selon le besoin ; — enfin, peu-à-peu il en vint à lier les saucisses à son tour, tandis que la veuve en tenoit le bout dans ses dents.

» Or, monsieur saura qu’une veuve tâche toujours de choisir son second mari entièrement différent du premier. — Si bien que l’affaire étoit d’à-moitié réglée dans l’esprit de la juive, avant que Tom eût parlé de rien.

» Elle feignit pourtant de vouloir se défendre, et se saisit d’une saucisse, mais Tom à l’instant se saisit d’une autre…

» Monsieur comprend bien que la veuve ne fut pas la plus forte.