Page:Sterne - Œuvres complètes, t3-4, 1803, Bastien.djvu/526

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tout d’un voile, et qui donne le droit de faire des questions, avec autant de détails et de particularités qu’un chirurgien. —

N’y avoit-il point de relâche ? — En souffroit-il moins au lit ? — Se couchoit-il également sur les deux côtés ? — Pouvoit-il monter à cheval ? — Le mouvement lui étoit-il contraire ? — etc. —

Tout cela étoit dit si tendrement, tout cela étoit si bien dirigé vers le cœur de mon oncle Tobie, que chacune de ces remarques y pénétroit dix fois plus avant que sa blessure elle-même n’avoit jamais fait. — Mais quand Mistriss Wadman prit la route de Namur pour arriver à l’aîne de mon oncle Tobie ; — quand elle le conduisit à l’attaque de la pointe de la contrescarpe avancée, — et bientôt l’épée à la main, pêle-mêle avec les Hollandois, s’emparant de la contre-garde du bastion de Saint-Roch ; — lorsqu’enfin, avec le son de voix le plus tendre, elle le sortit tout sanglant de la tranchée, le tenant par la main, et s’essuyant les yeux tandis qu’on le ramenoit dans sa tente… — ciel ! terre ! mer ! tout s’anima en lui, — les sources de la nature s’élevèrent au-dessus de leur niveau, — l’ange de la pitié s’assit à côté de lui sur le sopha, son cœur étoit embrâsé, — il re-