Page:Sterne - Œuvres complètes, t3-4, 1803, Bastien.djvu/53

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de garde de remédier) servoit de prétexte et d’excuse à cette manœuvre, laquelle se répétoit aussi souvent qu’il étoit nécessaire. — On laissoit donc un passage, non pas aussi large à la vérité que celui des Dardanelles, mais suffisant pour qu’on pût apprendre par ce moyen tout ce qu’il étoit intéressant de savoir, et éviter par-là à mon père l’embarras de gouverner lui-même sa maison. —

Ma mère en profita dans cette occasion. — Obadiah en avoit fait autant, après avoir laissé sur la table la lettre qui apportoit la nouvelle de mon frère. — De sorte qu’avant que mon père fût revenu de sa surprise, et eût commencé sa harangue, — Trim, debout dans la cuisine, s’étoit mis à pérorer sur le même sujet.

Il y a tel curieux, de ceux qui aiment à observer la nature, qui, s’il eût eu en sa possession toutes les richesses de Job, en auroit donné la moitié avec plaisir, pour entendre le caporal Trim et mon père, deux orateurs si opposés par leur nature et leur éducation, haranguer sur la même tombe.

Mon père, homme prodigieusement instruit, à l’aide d’une mémoire sûre et d’une lecture immense, à qui tous les grands philosophes de l’antiquité étoient familiers,