Page:Sterne - Œuvres complètes, t3-4, 1803, Bastien.djvu/63

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que l’année ait achevé son tour, plus d’un œil brillant sera terni. — Un œil brillant ! dit Suzanne. — Suzanne pleura, mais d’un œil de reconnoissance.

» Ne sommes-nous pas, continua Trim, en fixant toujours Suzanne, — ne sommes-nous pas comme la fleur des champs ? » — (Ici une larme d’orgueil se glissa dans l’œil de Suzanne entre deux larmes d’humilité, — c’est la seule manière d’expliquer son affliction). « Toute la chair n’est-elle pas comme du foin ? — comme de l’argile ? ( — comme de la boue ? ») — (Tous regardèrent le marmiton ; il continuoit à écurer son chaudron : — il n’étoit pas beau).

« Qu’est-ce que la beauté ? continua Trim. — (Je passerois ma vie à entendre le caporal, disoit Suzanne). — Qu’est-ce que le plus beau visage qu’on ait jamais vu ? — Suzanne avoit mis sa main sur l’épaule du caporal). — Qu’est-ce autre chose que de la Corruption ? » — (Suzanne la retira).

Mais c’est pour cela même que je vous aime, ô femmes ! — c’est ce délicieux mélange qui vous rend de si chères et de si charmantes créatures. — Eh ! qui pourroit vous en faire un crime ? — qui pourroit vous en vouloir ? — Celui-là, s’il en existe un seul,