Page:Stevens - Fables, 1857.djvu/23

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

X.

LE CERF ET LE MANANT.


« Bon homme ! par pitié laissez-moi, je vous prie,
 « Ici me cacher un instant.
« Des gens veulent ma mort, je vous devrai la vie. »
Ainsi parlait un cerf essoufflé, pantelant,
Qui tâchait par ses pleurs d’émouvoir un manant.
 — « Soit, lui répond l’homme aussitôt,
« Je veux bien envers toi me montrer secourable ;
 « Va de ce pas dans mon étable
« Te cacher de ton mieux. » Le cerf y court. Bientôt
 Survient le chasseur au galop.
Il voit le rustre et crie : « Eh l’homme ! Holà ! Ho !…
« Un cerf a-t-il passé tout à l’heure en la plaine ?… »
— « Non, monseigneur,… répond le manant incertain
 Tout en indiquant de la main
L’endroit qui recélait le fuyard hors d’haleine.
Le Nemrod n’y prend garde et part à fond de train,
De son côté le Cerf enfile la venelle,
Et l’homme de crier : « Où courez-vous ainsi ?…
« Quitte-t-on de la sorte un généreux ami ?…
« Arrêtez un instant, payez-moi de mon zèle
« À vous avoir sauvé ?… » — « Quoi ? répond le coureur
 « En fuyant de plus belle,
« Vous osez bien pour prix d’une infâme noirceur
 « Exiger une récompense ?…