Page:Stevenson - Catriona.djvu/110

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peu avant quatre heures chez Mrs Drummond Ogilvy.

Les deux femmes étaient dans la maison ; la porte était ouverte ; en les voyant, j’ôtai mon chapeau :

« Voici un jeune homme qui vient chercher six pence », m’écriai-je, pensant plaire ainsi à la veuve. Catriona accourut au-devant de moi et, à ma grande surprise, la vieille dame fut tout aussi aimable. J’appris plus tard qu’après ma première visite, elle avait dépêché un homme à Rankeillor qu’elle savait voisin de Shaws, et qu’elle avait reçu en réponse une lettre de mon ami pleine d’éloges sur mon compte.

Mais eussé-je lu cette lettre, je n’aurais pas compris davantage les secrets desseins de la dame.

« Il est possible, me dit-elle, que vous ayez été élevé à la campagne, mais vous êtes bien moins campagnard que je ne l’avais cru d’abord. Vous avez les manières du monde. »

Sa façon d’être avec moi était entièrement différente, elle me témoignait presque de l’amitié. Enfin, je compris qu’elle avait envie de me marier à sa cousine, moi, un jeune homme imberbe, mais qui étais quelque chose comme un laird[1], à Lothian !

« Monsieur Six pence soupera avec nous, Catriona, dit-elle, courez le dire aux servantes. »

Lorsque nous fûmes seuls, elle se donna toute la peine possible pour me plaire, s’y prenant habilement et, sous le couvert de la plaisanterie, m’appelant Six pence, mais d’un ton flatteur et aimable.

Quand Catriona revint, son but fut encore plus évident et elle se mit à me vanter les qualités de la jeune fille comme un maquignon ferait pour un cheval. J’étais vexé de voir qu’elle me croyait si nigaud ; je voyais bien que Catriona n’était pour rien dans ce manège, et par

  1. Laird, en écossais, signifie lord, seigneur, propriétaire.