Page:Stevenson - Catriona.djvu/130

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— Il me sied mal de me plaindre, d’ailleurs, reprit-il, moi qui suis à peine sorti de ma meule de foin.

— Vous en étiez donc bien las de votre meule ?

— Las n’est pas le mot, je ne suis pas homme à me laisser aisément démoraliser, mais j’aime mieux être à l’air libre et voir le ciel au-dessus de ma tête. Je suis comme le vieux Black Douglas, qui aimait mieux entendre chanter l’alouette que la souris. Et cet endroit, voyez-vous, David, quoique ce fût une place excellente pour se cacher, était sombre du matin au soir. Il y avait des jours (ou des nuits, car comment les distinguer !) qui me semblaient durer autant que tout un hiver.

— Comment saviez-vous l’heure du rendez-vous ?

— Le brave homme m’apportait chaque soir de la viande et une goutte d’eau-de-vie ; comme il venait à onze heures, je savais que, quand j’avais mangé, il était temps d’aller dans le bois. Là, je me couchais et je vous attendais, David, ajouta-t-il en me tapant sur l’épaule ;… puis je devinais de mon mieux quand les deux heures étaient écoulées, alors, je revenais à ma meule de foin. Ce n’était pas un métier agréable, et je remercie Dieu d’avoir pu le supporter.

— Que faisiez-vous dans cette solitude ?

— Mon Dieu, pas grand’chose : quelquefois, je jouais aux osselets, je suis un passionné joueur d’osselets ; mais il n’y a pas grand intérêt à jouer quand personne ne vous applaudit. D’autres fois, je composais des chansons…

— Sur quels sujets ?

— Oh ! sur les cerfs… et sur la bruyère, et sur nos anciens chefs qui sont tous disparus depuis longtemps ;… enfin, sur les sujets ordinaires des chansons. Puis je faisais semblant d’avoir des cornemuses et de jouer. Je jouais quelques grands exploits,… il semblait que j’en étais spectateur. Mais l’important, c’est que c’est fini. »

Cela l’amena à me faire conter mes aventures plus en