Page:Stevenson - Catriona.djvu/178

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et le crépuscule me surprit dans un lieu désert un peu à l’est de Balderridder. Je n’étais pas très sûr de ma direction et mon cheval commençait à se fatiguer.

Dans la hâte de ma course et pour ne pas avoir l’ennui d’un guide, j’avais suivi de mon mieux l’itinéraire de mon voyage avec Alan. J’avais pris cette décision de sang-froid, sans me bercer d’illusions sur les risques à courir, dont la tempête avait fait une réalité. Vers six heures du soir je me trouvai près de Nam Var, puis il m’est impossible de dire où j’ai passé : en tout cas, je fus heureux d’arriver vers onze heures à ma destination, qui n’était autre que la maison de Duncan Dhu. Pendant les dernières heures, j’avais été deux fois désarçonné et mon cheval s’était embourbé jusqu’au ventre.

Par Duncan, j’eus des nouvelles du procès ; dans toute la région, on en suivait les péripéties avec un intérêt palpitant, les bulletins arrivaient d’Inverary aussi vite qu’un homme pouvait les porter. Je fus heureux d’apprendre que jusqu’à une heure avancée ce jour-là, samedi, rien n’était terminé ; on croyait même que le jugement ne pourrait être rendu que le lundi. Sous l’éperon de cette nouvelle, je ne voulus pas m’asseoir pour manger et Duncan ayant consenti à me servir de guide, je me mis aussitôt en chemin à pied, dévorant quelques provisions tout en marchant. Duncan portait un mousquet et une lanterne, qui nous éclairait juste assez longtemps pour nous permettre de la rallumer dans quelque maison ; l’huile suintait outrageusement, et elle s’éteignait à chaque bouffée de vent. La moitié de la nuit, nous marchâmes à tâtons sous des averses glacées, une chaumière isolée nous servit d’abri, et ses habitants nous remirent dans la bonne route. Nous arrivâmes à Inverary et, avant la fin du sermon, nous nous arrêtâmes à la porte de l’église.

J’étais si fatigué, que je pouvais à peine me tenir sur