Page:Stevenson - Catriona.djvu/218

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mon habillement, car cela rentrait dans le cadre de leurs pensées habituelles ; mais, quoique polies et même cordiales, souvent, elles n’avaient pas l’air de remarquer ma présence, ou ne savaient pas toujours dissimuler que je les ennuyais. Quant à leur tante, c’était une personne originale et je pense qu’elle m’accordait autant d’attention qu’au reste de la famille, ce qui n’est pas beaucoup dire ! Miss Grant et l’avocat général étaient donc mes seuls amis et notre familiarité s’accrut bientôt d’un plaisir commun : l’équitation. Pendant une vacance des tribunaux, nous étions allés tous les trois passer quelques jours au château de Grange, et là, nous avions commencé à monter à cheval à travers champs. De retour à Édimbourg, nous continuâmes autant que le permettaient les continuelles occupations de l’avocat général. Quand nous étions bien mis en train par l’ardeur de la course à cheval, par les obstacles à vaincre ou par les intempéries, ma timidité était entièrement vaincue ; la différence de rang s’oubliait et les phrases n’étant pas de commande, venaient tout naturellement sur les lèvres ; c’est ainsi, au cours de ces agréables promenades, qu’on me fit raconter ma vie, depuis le jour où j’avais quitté Essendean, jusqu’à mon voyage à bord du Covenant et la bataille sur le carré, le naufrage, ma fuite dans les bruyères, etc.

L’intérêt qu’ils prirent à mon histoire leur inspira le désir de voir Shaws et, un jour de congé du tribunal, nous montâmes à cheval de bon matin et prîmes cette direction.

Bientôt, nous fûmes à portée de mon patrimoine ; la maison s’élevait au milieu d’une plaine givrée par un froid intense ; tout semblait désert et les cheminées sans fumée donnaient l’impression de la solitude et de la désolation. Là, lord Prestongrange mit pied à terre, me donna son cheval et alla seul rendre visite à mon oncle,