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XXX

LA LETTRE VENUE DU VAISSEAU


À la lumière du jour, nous remarquâmes le complet isolement de l’auberge dans la campagne. La mer était proche, et cependant, elle était cachée par les dunes. On n’apercevait rien à l’horizon que les ailes d’un moulin à vent qui ressemblaient aux oreilles d’un âne dont le corps resterait invisible. Quand la brise se leva, ce fut un curieux spectacle de voir ces deux grandes voiles tourner et se poursuivre indéfiniment derrière la dune. Il n’y avait pas de chemin, mais de nombreux sentiers aboutissaient à la porte de l’auberge. Bazin était un homme qui faisait toutes sortes de métiers interlopes, et à la situation isolée de son auberge, il devait le plus clair de sa fortune. Elle était fréquentée par les contrebandiers ; les agents politiques et les proscrits venaient y attendre leur embarquement ; là, une famille entière pouvait disparaître sans que personne s’en doutât jamais.

Je dormis peu et mal. Longtemps avant l’aube, je me glissai hors du lit et j’allai me chauffer dans la salle, puis je me promenai devant la porte. La matinée était brumeuse, mais peu à peu, le vent balaya les nuages, et mit le moulin en mouvement ; on entendait de