Page:Stevenson - Catriona.djvu/51

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les bavardages de ce genre. Le duc d’Argyle, vous voyez que je vous parle franchement, prend cette affaire à cœur comme moi, ainsi que le service de Sa Majesté et nos fonctions judiciaires nous y obligent ; il serait à désirer, dans ces tristes temps, que toutes les mains fussent également pures de rancunes familiales. Mais comme il est arrivé que c’est un Campbell qui est tombé martyr de son devoir (et je puis bien dire, moi qui ne suis pas Campbell, qu’ils ont toujours donné l’exemple en face du danger), donc comme il est arrivé que c’est un Campbell qui a été assassiné et que le hasard fait que c’est aussi un Campbell qui est le chef de la Cour de justice, les petits esprits et les mauvaises langues ont beau jeu. Voilà même qu’un jeune gentilhomme comme monsieur Balfour est assez mal avisé pour se faire l’écho de pareils bruits. »

Il avait dit tout cela sur un ton majestueux comme s’il parlait devant la Cour. Il changea brusquement et ajouta d’un bon naturel :

« Ceci à part, il me reste à savoir ce que je dois faire de vous ?

— J’aurais cru, répondis-je, que c’était plutôt à moi de l’apprendre de Votre Excellence.

— C’est vrai, vous avez raison. Mais vous venez bien recommandé ; cette lettre est signée du nom d’un fidèle Pilrig. Et puis, monsieur Balfour, vous n’ignorez pas qu’il y a toujours moyen de s’arranger extra-judiciairement. Je vous dis (et je vous le dis d’avance), tenez-vous sur vos gardes : votre sort dépend de moi seul. En de telles matières, soit dit avec tout le respect voulu, je suis plus puissant que le roi. Si vous me plaisez (tout en satisfaisant ma conscience, bien entendu) dans ce qui me reste à entendre de votre déposition, je vous le dis, elle pourra rester entre nous.

— Que voulez-vous dire par là ?