Page:Stevenson - Catriona.djvu/72

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réquisitoire et que l’on verra que vous, un jeune homme d’éducation, vous êtes laissé corrompre jusqu’à accomplir cet acte dégradant, pour un costume neuf, une bouteille d’eau-de-vie des Highlands, et quelques pièces de cuivre.

L’apparence de vérité qu’il y avait dans ces mots tomba sur moi comme un coup de massue : des habits, une bouteille de « usquebaugh » et quelque menue monnaie, c’était bien tout ce qu’Alan et moi avions emporté d’Aucharn, et je vis que quelques-uns des compagnons de James avaient dû bavarder en prison.

« Vous voyez ? j’en sais plus long que vous ne pensiez, continua-t-il triomphant. Et quant à donner cette tournure à l’affaire, mon grand monsieur Balfour, vous ne devez pas supposer que le gouvernement de Grande-Bretagne et d’Irlande sera jamais à court de témoins. Nous avons des hommes en prison qui jureront ce que nous voudrons pour sauver leur vie, ce que je voudrai, si vous préférez l’expression. Vous pouvez maintenant deviner quelle sera votre gloire si vous choisissez de mourir ! D’un côté, la vie, le vin, les femmes et un duc pour protecteur. De l’autre, un gibet et la plus honteuse histoire à laisser à vos neveux dans l’avenir. Voyez ! s’écria-t-il d’une voix perçante, voyez ce papier que je retire de ma poche. Lisez ce nom : c’est le nom du grand David, je crois ; l’encre est à peine sèche. Devinez-vous la nature de ce document ? C’est un mandat d’arrêt et je n’ai qu’à toucher ce timbre pour le faire exécuter sur-le-champ. Une fois incarcéré à l’aide de ce papier, Dieu vous garde, car la mort est certaine. »

Je me sentais terrifié à la vue de tant de bassesse et amolli par l’horreur et l’imminence du danger. M. Simon s’était déjà félicité de mon changement de couleur ; je devais maintenant être pâle comme un linge, ma voix tremblait malgré l’effort de ma volonté.