quelqu’un à l’esprit, mais il le faisait plutôt comme un écolier fanfaron que comme un homme.
Il se vantait de maints actes de sauvagerie et de méchanceté qu’il avait commis, vols furtifs, fausses accusations, et même, je crois, un assassinat, mais tout cela manquait tellement de vraisemblance dans les détails, tout cela était conté avec tant de faiblesse d’invention, tant d’absurdité que j’étais plus disposé à le prendre en pitié qu’à le croire.
Je lui demandai des renseignements sur le brick.
Il déclara que c’était le plus beau navire du monde.
Je l’interrogeai sur le capitaine Hoseason : il en fit également un éloge superlatif.
Heasy-Oasy, comme il appelait le patron, voilà un homme qui, selon lui, ne s’émouvait de rien au ciel et sur terre, un homme qui, comme on dit, se présenterait toutes voiles debout au jour du jugement, un homme rude, farouche, sans scrupules, et brutal.
Et tout cela, mon pauvre mousse avait appris à le considérer comme le caractère du vrai marin, de l’homme.
Il ne trouvait qu’un défaut dans son idole :
— Il n’est pas homme de mer, disait-il. C’est M. Shuan qui fait naviguer le brick. C’est le plus fin marin qu’il y ait dans sa patrie ; seulement il boit, et pour ça je vous en réponds ! Tenez, regardez.
Et rabattant un de ses bras, il me montrait une large blessure rouge, saignante, qui me glaça le sang :
— C’est lui qui a fait cela ?
— C’est M. Shuan qui l’a fait, me dit-il d’un ton de fierté.
— Comment ? m’écriai-je, c’est avec cette brutalité