Page:Stevenson - Enlevé !.djvu/254

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dans nos souliers, et nous dans les siens, chose parfaitement possible, je crois que nous lui aurions de grandes obligations, s’il se chargeait d’attirer de son côté les soldats.

Puisqu’on en venait là, je renonçai à convaincre Alan.

Mais pendant tous ces propos, il avait l’air si innocent, il était si évidemment de bonne foi dans son langage, si prêt à se sacrifier pour ce qu’il regardait comme son devoir, que cela me ferma la bouche.

Les paroles de M. Henderland me revinrent à l’esprit et me rappelèrent que nous aurions plus d’une leçon à recevoir de ces sauvages Highlanders.

Eh bien ! cette leçon, je l’avais reçue, pour mon compte.

La morale d’Alan se présentait tout à rebours, mais telle qu’elle était, il eût donné sa vie pour elle.

— Alan, dis-je, je ne prétends pas que c’est du vrai Christianisme, comme je l’entends, mais il est assez bon néanmoins. Et maintenant, je vous offre la main pour la seconde fois.

Alors il me tendit ses deux mains, en disant que sûrement je lui avais jeté un sort, car il pouvait me pardonner n’importe quoi.

Puis il prit un air très grave, et me dit que nous n’avions pas beaucoup de temps à gaspiller, et que nous devions fuir de ce pays l’un et l’autre, lui parce qu’il était un déserteur, et que tout Appin serait fouillé comme une simple chambre, et que chacun serait obligé de s’expliquer d’une manière satisfaisante ; et moi parce que j’étais certainement impliqué dans le meurtre.

— Oh ! dis-je, pour lui donner une petite leçon, je n’ai rien à craindre de la justice de mon pays.