Page:Stevenson - Enlevé !.djvu/62

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La singulière étroitesse des bornes de ce monde, et par-dessus tout le petit nombre des combinaisons humaines s’imposent également à l’esprit du lecteur et à celui du voyageur. Le premier court de livre en livre, le second à travers l’espace peuplé, et ils retombent tout étonnés sur les mêmes histoires plaisantes, la même mode, la même phase d’évolution sociale. Sous un voile de ténèbres, ce port-ci pourrait être un port des Hébrides, et s’il me fallait appeler ces gens-ci des sauvages (chose que tout l’or du monde ne me ferait point faire), quel nom pourrais-je trouver pour l’habitant des Hébrides ? Les Highlands et les Îles, pour peu qu’on remonte à plus d’un siècle, étaient dans une crise de convulsion et de transition, tout comme les îles Marquises aujourd’hui. Dans l’une, est proscrite l’habitude autrefois générale du tatouage, dans l’autre un costume préféré ; dans les deux, les hommes désarmés, les chefs avilis, de nouvelles modes introduites, et principalement cette nouvelle et pernicieuse mode de faire de l’argent le but final de l’existence ; l’âge commercial, succédant soudain à l’âge militant ; la guerre, avec ses trêves et ses coutumes courtoises, remplacée soudain par la paix et ses efforts sans fin ; les moyens d’existence cessant d’être arrachés impudemment des mains d’un ennemi héréditaire, pour être soustraits par des exigences et des filouteries à des voisins porte à porte, à de vieux amis de la famille ; dans les deux cas, l’homme privé de son luxe ; de même que pour le couvert des ombres de la nuit, l’on emmène les bœufs loin des pâturages des basses terres interdites au Highlander qui aime la viande, de même ici les porcs du village voisin sont enlevés la nuit par le Canaque anthropophage.


Ainsi transporté dans le monde où se maria Loti, Stevenson s’y trouvait de plain-pied grâce à ce qu’il savait des Highlands.


« Quand j’avais besoin de quelque détail de coutume