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L’ÎLE AU TRÉSOR

tête sur tes épaules, John, il n’y a pas d’erreur. À Dieu vat, les gars ! Ce matelot-là se trompe de bordée, que je crois. Et en y réfléchissant, la voix ressemblait un peu à celle de Flint, je vous l’accorde, mais elle avait moins de largue, tout compte fait. On dirait plutôt la voix de quelqu’un d’autre… on dirait celle…

— De Ben Gunn ! par tous les diables ! rugit Silver.

— Oui, c’est bien ça, s’écria Morgan, en se relevant sur les genoux. C’était Ben Gunn !

— Ça ne fait pas grande différence, trouvez-vous pas ? interrogea Dick. Ben Gunn, pas plus que Flint, n’est ici présent dans son corps.

Mais les aînés des matelots accueillirent cette remarque avec dédain.

— Eh ! personne ne craint Ben Gunn, cria Merry. Mort ou vivant, personne ne l’a jamais craint.

Je n’en revenais pas de voir à quel point ils avaient repris courage, et combien leurs visages avaient retrouvé leurs couleurs naturelles. Bientôt ils se remirent à bavarder entre eux, tout en écoutant par intervalles ; et un peu plus tard, n’entendant plus rien, ils rechargèrent les outils sur leurs épaules et se remirent en marche, sous la conduite de Merry, qui portait le compas de Silver pour les maintenir dans l’alignement de l’îlot du Squelette. Merry avait dit vrai : mort ou vivant, personne ne craignait Ben Gunn.

Dick seul tenait toujours sa bible, et tout en marchant lançait autour de lui des regards apeurés, mais il n’éveillait aucune sympathie, et Silver le plaisanta même sur ses précautions.

— Je te l’avais dit, railla-t-il, je te l’avais bien dit, que tu avais gâché ta bible. Si elle ne vaut plus