Page:Stevenson - La Flèche noire.djvu/211

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Richard prit place à l’avant. Sauf la lanterne même du vaisseau et quelques lumières dans Shoreby, qui déjà disparaissait sous le vent, dans l’atmosphère entière qui les entourait, il faisait noir comme dans un four. Parfois, lorsque la Bonne Espérance s’abattait vertigineusement dans la vallée des vagues, une crête se brisait, une énorme cataracte d’écume neigeuse prenait tout à coup naissance, pour, l’instant d’après, s’écouler en torrent dans le sillage, et disparaître.

Plusieurs des hommes s’accrochaient et priaient à haute voix, un plus grand nombre étaient malades, et s’étaient traînés jusqu’à la cale, où ils se débattaient au milieu de la cargaison. Et avec l’extrême violence de la marche, et les continuelles bravades d’ivrogne de Lawless qui criait et chantait toujours à la barre, le plus ferme courage à bord devait avoir une terrible méfiance du résultat.

Mais Lawless, comme guidé par l’instinct, gouvernait entre les brisants, se jetait sous le vent d’un grand banc de sable, où ils naviguèrent un moment dans des eaux tranquilles, et, bientôt après, amena le vaisseau le long d’une grossière jetée de pierres, où il fut hâtivement attaché, et resta, plongeant et grinçant dans l’obscurité.