Page:Stevenson - Le Maître de Ballantrae, 1989.djvu/152

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

est Tien, et la puissance, et la gloire, pour les siècles des siècles. Amen.

– Ah ! c’est facile à dire, répliqua Mylord. C’est bien facile à dire, Mackellar. Moi, pardonner !… Mais j’aurais l’air d’un imbécile si j’avais l’audace de le prétendre.

– L’enfant, Mylord ! dis-je, non sans sévérité, car je trouvais ses expressions peu convenables en présence d’un enfant.

– Oui, c’est juste, dit-il. Ce sont histoires un peu sombres pour un gamin. Allons chercher des nids.

Ce fut sinon le même jour, du moins peu après, que Mylord, me trouvant seul, se déboutonna davantage sur le même sujet.

– Mackellar, dit-il, je suis à présent très heureux.

– Je le crois bien, Mylord, dis-je, et de vous voir ainsi me dilate le cœur.

– Le bonheur a ses obligations, ne croyez-vous pas ? dit-il rêveusement.

– J’en suis persuadé, dis-je, tout comme le malheur. Si nous n’étions ici-bas pour tâcher de faire mieux, à mon humble avis, plus tôt nous serions disparus, mieux cela vaudrait pour tout le monde.

– Oui, mais si vous étiez dans ma peau, lui pardonneriez-vous ? La brusquerie de l’attaque me déconcerta un peu.

– C’est notre devoir strict, dis-je.

– Tu ! tu ! dit-il. Ce sont des mots. Vous-même, lui pardonnez-vous ?

– Eh bien… non ! dis-je. Dieu me pardonne, mais je ne peux pas.

– Serrons-nous la main là-dessus ! s’écria Mylord, presque gaiement.

– C’est une mauvaise occasion de se serrer la main, dis-je, pour des chrétiens. Je me réserve pour une autre, plus évangélique.

Je dis cela en souriant un peu ; mais Mylord, lui, quitta la chambre avec un grand éclat de rire.

Je ne trouve pas d’expression adéquate pour qualifier l’esclavage de Mylord à l’égard de l’enfant. Il était