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DE L’AMOUR ET DE LA POLITIQUE

tort. J’abjure mon scepticisme philosophique : je m’aperçois que tes fautes sont impardonnables. Tu es incapable de faire un prince, incapable de faire un mari. Et je te donne ma parole que je préférerais de beaucoup voir un homme faire le mal d’une façon capable, que de s’embrouiller en tâchant de bien agir.

Othon, extrêmement maussade, gardait le silence.

Au bout d’un certain temps le docteur reprit : — Je commencerai par le moins important, ta conduite envers ta femme. Tu es allé, à ce que j’apprends, chercher une explication avec elle. Cela pouvait être bien ou mal, je n’en sais rien. Mais une chose est certaine, c’est que tu l’as courroucée. Au Conseil, elle t’insulte… Et qu’est-ce que tu fais ? tu l’insultes à ton tour ; toi, un homme, contre une femme ; toi, le prince contre ta princesse… et en public ! Ensuite, par-dessus le marché, tu te proposes (l’histoire en court comme le vent) de lui retirer le droit de signature. Crois-tu qu’elle te pardonne jamais cela ? Elle, femme, jeune, ambitieuse, ayant conscience de talents bien supérieurs aux tiens ?… Jamais de la vie, Othon ! Puis, en fin de compte, à un moment critique comme celui-là, tu vas t’enfoncer dans l’encognure d’une fenêtre avec cette reluqueuse de Rosen ! Je n’imagine pas pour un instant qu’il y ait là grand mal, mais ce que je maintiens c’est que c’était, à plaisir, manquer de respect à ta femme. Car, voyons, cette dame est impossible.

— Gotthold, dit Othon, je ne veux pas entendre dire du mal de la comtesse !