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DE L’AMOUR ET DE LA POLITIQUE

un temps précieux à mendier de l’argent ! Mais, au nom du ciel, pourquoi faire ? Pourquoi de l’argent ! Quel mystère idiot se cachait là-dessous ?

— Ce n’était pour rien de bien méchant, dit Othon avec humeur. C’était pour acheter une ferme.

— Acheter une ferme ! cria Gotthold. Acheter une ferme !

— Eh bien, oui. Et puis après ? Et, quant à cela, je l’ai achetée, cette ferme.

Gotthold bondit sur son siège. — Et comment cela ? s’écria-t-il.

— Comment ? répéta Othon, un peu saisi.

— Eh oui, comment ! répliqua le docteur. Comment en as-tu trouvé l’argent ?

La figure du prince s’assombrit. — Cela, dit-il, c’est mon affaire.

— Tu vois bien que tu as honte, riposta Gotthold. Ainsi tu achètes une ferme au moment où ton pays est en danger !… Sans doute afin d’être prêt pour ton abdication. Et j’opine que tu as volé les fonds. Il n’y a pas trois moyens d’obtenir de l’argent, il n’y en a que deux ; le gagner ou le voler. Et maintenant, après avoir combiné Charles-Quint avec Cartouche, tu viens me trouver pour que je fortifie ta vanité. Mais je veux avoir le cœur net de cette affaire : jusqu’à ce que je sache à fond ce qu’il en est, je garde ma main derrière mon dos. On peut être le prince le plus piteux du monde, mais il faut rester gentilhomme sans tache.

Le prince s’était levé, pâle comme un linge.

— Gotthold, dit-il, vous me poussez à bout. Prenez garde, Monsieur,… prenez garde !