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Page:Stevenson - Le Roman du prince Othon.djvu/273

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HEUREUSE INFORTUNE

un grand écrivain, dans la personne de monsieur le docteur…

— Gotthold ! s’écria Othon.

— Oui, dit le docteur avec amertume. Il paraît qu’il nous faut voyager ensemble. Votre Altesse n’avait pas compté là-dessus !

— Qu’en concluez-vous ? s’écria le prince ; que c’est moi qui vous ai fait arrêter ?

— La conclusion est assez simple.

— Colonel, fit le prince, faites-moi une grâce : justifiez-moi auprès de M. de Hohenstockwitz !

— Messieurs, dit alors le colonel, vous êtes tous deux arrêtés en vertu du même mandat, signé de la princesse Séraphine, régente, contresigné du-baron de Gondremark, premier ministre, et daté d’avant-hier, le douze. Je révèle, comme vous voyez, ajouta-t-il, le secret de la prison.

— Othon, dit Gotthold, pardonne-moi mes soupçons !

— Je ne sais guère, Gotthold, si je le puis.

— Et moi, s’interposa le colonel, je suis certain que Votre Altesse est trop magnanime pour hésiter un moment. Mais qu’elle me permette un avis ! Chez moi, dans mon pays, la religion que nous pratiquons nous apprend que la grâce entre dans l’âme par divers chemins : je vais vous proposer d’en essayer un avec moi.

Sur ce, le colonel alluma une lampe qu’il accrocha dans un coin de la voiture ; puis, tirant de dessous le siège un panier de mine avenante, d’où s’allongeait le goulot de plus d’une séduisante bouteille, il s’écria gaiement : Tu spem reducis…