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LE ROMAN DU PRINCE OTHON

Kuno, il se trouve un jour en faute ; et Othon, qui a la main-vive, vous lève son fouet et, à ce qu’on dit, vous le rosse d’importance. D’abord Kuno le supporta de son mieux ; mais à la fin, ma foi, il éclata, et se retournant contre le prince, le défia de jeter son fouet et de lutter avec lui comme un homme. Nous sommes forts lutteurs dans le pays, et c’est à la lutte généralement que se décident nos querelles. Or donc, Monsieur, le prince accepta, et comme ce n’est, après tout, qu’un être assez chétif, les choses changèrent promptement de tournure, et l’homme qu’un moment auparavant il fouaillait comme un esclave, l’enleva d’un coup d’épaule et l’envoya rouler la tête la première.

— Et lui cassa le bras gauche, s’écria Fritz, et, il y en a qui disent, le nez aussi. Et moi je dis : c’est bien fait ! Homme contre homme ; lequel vaut mieux, à ce compte-là ?

— Et alors ? demanda Othon.

— Oh ! alors Kuno le reporta chez lui, et dès ce jour ce furent les meilleurs amis du monde ! Je vous ferai observer, continua Gottesheim, que je ne dis pas que cette histoire lui fasse du tort, mais, il n’y a pas à dire, elle est drôle. On devrait réfléchir, avant de frapper son prochain, car, comme dit mon neveu, homme contre homme, c’est ainsi qu’on jugeait autrefois.

— Eh bien, dit Othon, si l’on me demandait ce que j’en pense, je vous étonnerais peut-être… mais il me semble à moi que ce jour-là ce fut le prince qui obtint la vraie victoire.

Killian devint tout à coup sérieux : — Et vous