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CHAPITRE III

OÙ LE PRINCE CONSOLE L’ÂGE ET LA BEAUTÉ, ET PRÊCHE LA DISCRÉTION EN MATIÈRE D’AMOUR


Le prince sortit de bon matin : à l’heure du premier concert des oiseaux, de l’air paisible et pur, des ombres qui s’allongent démesurément sous les rayons obliques du soleil. Pour qui a passé une mauvaise nuit, la fraîcheur de cette heure est tonique et vivifiante. Gagner une marche sur ses semblables endormis, être l’Adam de ce nouveau jour, cela lui calmait et lui fortifiait l’esprit : le prince, respirant avec force et s’arrêtant de temps à autre, se mit à marcher de compagnie avec son ombre à travers la rosée des champs, et il se sentit tout réjoui.

Un sentier longé par un treillis menait au vallon de la rivière ; il s’y engagea. Cette rivière n’était qu’un torrent de montagne, désordonné et écumant. Tout près de la ferme, en cascade semblable à une blanche touffe de crins entremêlés, elle sautait un petit précipice, pour tomber, pressée, tourbillonnante, dans le bassin qu’elle s’était creusé. Jusque vers le milieu de ce petit lac s’avançait un