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Page:Stevenson - Les Nouvelles Mille et Une Nuits, trad. Bentzon.djvu/76

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raldine était la bravoure même ; il accompagnait volontiers son maître. Nul ne s’entendait comme lui à inventer d’ingénieux déguisements ; il savait conformer non seulement sa figure et ses manières, mais sa voix et presque ses pensées à quelque caractère, à quelque nationalité que ce fût ; de cette façon il protégeait l’incognito du prince et il lui arrivait parfois d’être admis avec lui dans des cercles fort étranges. Jamais la police n’était instruite de ces périlleuses équipées, le courage imperturbable de l’un des compagnons, la présence d’esprit, l’adresse et le dévouement de l’autre suffisaient à les sauver de tous les périls.

Un soir, au mois de mars, ils furent poussés par des tourbillons de neige vers un bar voisin de Leicester-Square. Le colonel Géraldine jouait, cette fois, le rôle d’un petit journaliste réduit aux expédients ; le prince avait, comme d’habitude, changé complètement sa physionomie par l’addition de grands favoris et d’une paire de larges sourcils postiches. Ainsi défiguré, il pouvait, quelque connu qu’il fût, défier les gens de soupçonner son identité. Les deux compagnons savouraient donc à petits coups un mélange d’eau de seltz et de rhum dans une entière sécurité.

Le bar était rempli de buveurs, hommes et