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VI

Ma chaise de poste.


Le temps de faire des paquets, de signer des papiers et de prendre ma part d’un excellent souper froid dans la chambre de Romaine, deux heures du matin avaient sonné lorsque nous fûmes prêts à nous mettre en route. Nous ne savions trop par où devait s’opérer ma sortie, lorsque Rowley nous suggéra l’idée d’une certaine fenêtre donnant sur les écuries. Nous découvrîmes, par la même occasion, que cette fenêtre avait l’habitude de servir de porte aux domestiques, lorsque ceux-ci avaient en tête une soirée clandestine hors de la maison. Et je me rappelle encore l’aigre mine du notaire en recevant cette information. Le digne homme serrait les lèvres, fronçait les sourcils, répétait : « Il faut mettre ordre à cela, en vérité ! Dès demain matin, cette fenêtre sera condamnée ! » Mais ce n’en fut pas moins par cette fenêtre qu’il nous fit partir ; il nous tendit nos paquets, quand nous fûmes dehors, me serra une dernière fois la main, avec un grand air de mystère, en homme qui, dès l’instant suivant, ne devait plus me connaître. Et puis nous entendîmes la fenêtre se refermer derrière nous ; et bientôt nous nous trouvâmes perdus dans un affreux méandre de ténèbres, au milieu des vieux arbres du parc.

Une petite neige humide tombait avec somnolence, s’arrêtant, et tombant de nouveau ; elle semblait perpétuellement commencer à tomber et perpétuellement s’arrêter ;