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sayer de sortir, c’était risquer, presque à coup sûr, de me faire arrêter ; rentrer dans la salle signifiait m’exposer presque infailliblement à être découvert par mon cousin, qui, j’en étais certain, était venu à ce bal bien plus encore pour moi que pour lui-même.

Les chances me parurent si misérablement égales, des deux côtés, que je me rappelle que, pour prendre un parti sans trop de réflexion, je recourus au procédé traditionnel du jeu de pile ou face. Je tirai de ma poche une pièce d’argent ; et comme l’image que je vis sur la face était le portrait du roi Georges, j’en conclus que la destinée m’ordonnait de rentrer dans la salle. J’y rentrai donc : voilà ce que je sais. Mais je ne me charge pas de raconter comment je réussis à traverser de nouveau cette salle dans toute sa longueur, à traverser encore la salle de jeu, sous les feux du lorgnon de miss Gilchrist, à traverser une sorte de buffet, qui venait ensuite, et à découvrir enfin un second escalier, communiquant avec la cuisine. Le fait est que je me trouvai, tout à coup, dans une ruelle, d’où j’aperçus, à cent pas de moi, les lumières et les arbres de George Square. J’étais allé au bal, j’avais vu Flora, j’avais obtenu la promesse de ravoir mon argent ; et, Dieu merci, j’étais encore en liberté !