Page:Stirner - L’Unique et sa propriété, trad. Reclaire, 1900.djvu/139

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pour soulever l’homme contre son père et la fille contre sa mère  », et d’autres semblables, doivent s’entendre comme un appel à la famille céleste, à la vraie famille. L’État ne dit pas autre chose, lorsqu’il exige qu’en tout conflit entre la famille et lui on obéisse à ses ordres, à lui État.

Il en est de la Moralité comme de la Famille. Beaucoup ne se laissent plus arrêter par la morale qui auraient grand-peine à se dégager du concept « Moralité ». La Moralité est l’idée de la morale, sa force spirituelle, sa puissance sur les consciences ; la morale, au contraire, est trop matérielle pour dominer l’esprit et ne peut enchaîner un homme « spirituel », un soi-disant « libre penseur ».

Le Protestant a beau faire, la « Sainte Écriture », la « parole de Dieu », lui reste sacrée. Celui pour qui elle n’est plus « sacrée » a cessé d’être un Protestant. Il doit, du même coup, tenir pour sacré tout ce qui est par elle « ordonné », l’autorité instituée par Dieu, etc. Tout cela reste pour lui inexpugnable, intangible, « au-dessus de toute espèce de doute » et, par conséquent (le doute étant par excellence le propre de l’homme), — « au-dessus » de lui-même. Celui qui ne peut s’en détacher y — croit, car y croire signifie y être lié. Du fait que par le Protestantisme la foi est devenue plus intérieure, la servitude également est devenue plus intérieure ; on a attiré à soi, on s’est approprié tout ce qu’il y avait de sainteté dans les objets, on en a imprégné ses pensées et ses actes, on s’est fait des cas de conscience et on s’est tracé des devoirs sacrés. Aussi tout ce dont la conscience du Protestant ne peut s’affranchir lui est-il sacré, et le Protestant est-il consciencieux ; c’est le trait le plus saillant de son caractère.

Le Protestantisme a proprement organisé en l’homme un véritable service de « police occulte ».