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Page:Stirner - L’Unique et sa propriété, trad. Reclaire, 1900.djvu/53

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vrai que les autres flétrirent, comme un mensonge : l’idée tant exaltée de patrie perd son importance, et le Chrétien ne doit plus se regarder que comme « un étranger sur la terre  » ; l’ensevelissement des morts, ce devoir sacré qui inspira un chef-d’œuvre, l’Antigone de Sophocle, ne paraît plus qu’une misère (« Laissez les morts enterrer leurs morts ») ; l’indissolubilité des liens de famille devient un préjugé dont on ne saurait assez tôt se défaire, et ainsi de suite.

Nous voyons donc que ce que les Anciens tinrent pour la vérité était le contraire même de ce qui passa pour la vérité aux yeux des modernes ; les uns crurent au naturel, les autres au spirituel ; les uns aux choses et aux lois de la terre, les autres à celles du ciel (la patrie céleste, « la Jérusalem de là-haut », etc.). Étant donné que la pensée moderne ne fut que l’aboutissement et le produit de la pensée antique, reste à examiner comment était possible une telle métamorphose.

Ce furent les Anciens eux-mêmes qui finirent par faire de leur vérité un mensonge.

Remontons aux plus belles années de l’Antiquité, au siècle de Périclès : c’est alors que commença la sophistique, et que la Grèce fit un jouet de ce qui avait été pour elle jusqu’alors l’objet des plus graves méditations.

Les pères avaient été trop longtemps courbés sous le joug inexorable des réalités pour que ces dures expériences n’apprissent à leurs descendants à se connaître. C’est avec une assurance hardie que les SOPHISTES poussent le cri de ralliement : « Ne t’en laisse pas imposer ! » et qu’ils exposent leur doctrine : « Use en toute occasion de ton intelligence, de la finesse, de l’ingéniosité de ton esprit ; c’est grâce à