Page:Stirner - L’Unique et sa propriété.djvu/169

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de leur père trop étroite et trop basse pour pouvoir s’en contenter ; au lieu de se tenir dans les limites d’une façon de penser modérée et de considérer comme vérités intangibles ce qui donne à des milliers d’hommes la consolation et le repos, ils sautent par dessus les barrières du traditionalisme, et vagabonds extravagants, ils s’abandonnent sans frein aux fantaisies de leur critique impudente et de leur scepticisme effréné. Ils forment la classe des instables, des inquiets, des inconstants, c’est-à-dire des prolétaires et sont appelés, quand ils donnent libre cours à leur nature, des « mauvaises têtes ».

Tel est le sens que l’on donne au prolétariat ou paupérisme. Comme l’on se tromperait si l’on attribuait à la bourgeoisie l’intention d’employer ses meilleures forces à mettre fin à la misère (paupérisme) ! Au contraire, le bon bourgeois se repose sur la formule consolante que « les richesses sont inégalement réparties et qu’il en sera toujours ainsi, suivant la sage décision du Seigneur. » La misère, qu’il rencontre à tous les coins de rue, l’entraîne tout au plus à faire quelque aumône, ou à procurer du pain et du travail à quelque pauvre homme « honnête et qu’on peut utiliser. » Mais sa jouissance paisible est d’autant plus troublée quand la misère, insatisfaite de son sort, avide de nouveauté, ne veut plus se tenir tranquille, refuse de souffrir, commence à s’agiter et à extravaguer. Emprisonnez le vagabond, enfermez le fauteur de désordres, dans le cachot le plus sombre ! Il « veut provoquer dans l’État le mécontentement et renverser l’ordre établi, » lapidez-le, lapidez-le !

Mais le mécontentement même donne lieu au raisonnement que voici : peu importe aux « bons citoyens »