Page:Suarès - Sur la mort de mon frère.djvu/140

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aussi. Je compte les instants de notre ruine, mon Bien Aimé. Sera-t-elle si parfaite que rien de notre amour ne subsiste ? Alors, qu’il en soit de nous ce qui plaît à l’infini de notre misère. L’excès de la souffrance guérira la souffrance. J’attends cet apaisement. Ta douleur est la mienne, et l’injure qui t’est faite, et le divin reproche que ta douce sévérité faisait au rêve de la vie, dans ton silence, avec tant de dédain. Je me perds dans cette idée. Je renonce à ma vie sur ce tertre. Je renonce même au droit d’être plaint. Ô mon frère, tu n’es plus là : je ne serai pas pleuré comme je te pleure. Que la chose sans nom triomphe, si elle veut : je ne suis plus moi-même.

— Tu le seras pour moi, aussi longtemps que tu puisses être. Tu le seras, côte à côte avec ton bien aimé.