Page:Suarès - Sur la mort de mon frère.djvu/98

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l’enfant, qu’elles ont sur le bras, disant : « Vois, comme il a grandi : il sait sourire ». Ainsi que le mien, tous ceux que vous pleurez sont partis pour la campagne qui ne finit jamais, sur le grand océan de l’extrême infini. Je suis dépossédé par le malheur, comme vous. Et qui saura comme moi, pauvres gens, vos longues veilles dans le désespoir, les larmes du souvenir, et les terreurs de la question toujours présente : « Tout est-il donc fini ? » — et l’horrible certitude de la réponse où il faut se rendre : « Tout est fini. »

Pour inconnues que vous puissiez vous croire, sachez-vous donc ressenties, ô peines fraternelles. Vous n’êtes pas errantes sur ces routes dévastées de la vie, que la brume aveugle. J’ai mis, ce soir, ma douleur dans un clocher, au dessus de