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que le Bien était le plan réel de la compassion universelle. Elle l’a persuadé que ce Bien seul donne une réalité, à ce qui n’en a pas sans lui ; qu’il la crée incessamment ; qu’il est par là le divin, ou la réalité même ; et que, n’y ayant rien autre de vrai que lui, c’est pour lui seul qu’il faut vivre, puisque, lui ôté, il n’est point de vie.


XIII
GRANDE SOLITUDE DE TOLSTOÏ


Il y a une solitude plus profonde que la nuit arctique, plus étendue que la banquise du pôle. Il y a un désert plus vaste et plus immobile que la glace sur le toit de l’Asie, quand la lune de l’hiver l’illumine. C’est l’homme parmi les hommes ; et la volonté d’un seul homme, aux prises avec le monde durable et les jours éphémères, voilà l’abîme de Pathmos, où la solitude est parfaite.

Qui doit le savoir mieux que Tolstoï ? Le grand vieillard a voulu le règne de Dieu sur la terre, — et ce n’est pas d’aujourd’hui. Il a mis toute la force d’une logique puissante, au service de ce