Page:Suarès - Tolstoï.djvu/54

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profonds qui vont jusqu’à la bouche. Les oreilles sont fort grosses, quoique d’un assez beau dessin. La bouche est grande, les lèvres fortes, d’un contour simple, mais d’une expression admirable : on ne peut s’imaginer une forme plus éloquente ; et, même serrées, elles semblent pleines de paroles. Trois grandes rides courent sur le front, d’une tempe à l’autre, dans le sens des sourcils. C’est eux, c’est leur arche touffue et sombre, qui enchâsse ces yeux, d’une beauté singulière, où toute la vie du visage est contenue, et dont le sentiment de la bouche n’est que le reflet. Il les a assez petits, oblongs, reculés dans l’orbite, de couleur grise ; le regard profond et clair, parfois aigu, comme si le feu vif qu’il recèle venait à percer le voile léger dont il est couvert. Cette vapeur sur un foyer brûlant a dû faire le grand charme de ces yeux, qui firent tout celui de la personne. Comme beaucoup de contemplateurs attentifs, Tolstoï a la vue basse. Il n’avait rien pour plaire, et il n’a pas plu aux femmes : elles n’ont pas trouvé en lui l’espèce de cavalier à la française, ou d’Anglais homme de salon, fin, correct, précis et flatteur à porter au bras, comme