Page:Sue - Arthur, T1, 1845.djvu/119

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de l’allée : je frémis ; mais elle, si peureuse ordinairement, laissa franchir cet obstacle à son cheval, et je la perdis bientôt de vue dans la profondeur des bois.

Resté seul, ces mots d’Hélène, dits avec tant d’amertume : « Allez ! vous n’aimerez jamais rien. Vous serez toujours malheureux ! » me causèrent une sensation étrange ; je compris que c’était presque un aveu que mon silence.

Puis enfin, pensant à son trouble, à ses réticences, je ne doutai plus qu’elle ne m’aimât ; et cette espèce d’aveu de sa part me ravit si profondément, que je restai longtemps ivre de joie à me promener çà et là comme un insensé, sans pensées fixes, sans projets, mais heureux… oh ! profondément… heureux d’un bonheur ineffable mêlé d’un radieux orgueil.

Enfin, la nuit venue, je retournai au château. En entrant dans le salon, j’y vis Hélène : son teint était animé, ses yeux brillaient d’un singulier éclat ; assise au piano, elle jouait lentement, et de la manière la plus expressive, la dernière pensée de cher, cette phrase musicale d’une mélodie si suave et si mélancolique.

Lorsque Hélène me vil, elle me dit : « Avouez