Page:Sue - Arthur, T1, 1845.djvu/24

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Puis il reprit : — On m’amène donc mon porteur, et avant de monter à cheval je vois une grande main sèche, décharnée et couleur de bois, qui sort du rideau de cuir du berlingot, et paye Jean-Pierre à vingt-cinq sous. Voyant payer Jean-Pierre à vingt-cinq sous… je frémis… et je me dis à moi-même : Bon, vieil époumoné, tu vas faire une fameuse promenade au pas pour tes vingt-cinq sous : « Où allons-nous, monsieur ? — demandai-je au berlingot ; car je ne voyais personne, et la grande main sèche et jaune s’était retirée.

— Nous allons à ***, » me dit une voix, mais si faible, mais si éteinte qu’elle avait l’air d’une agonie ; et puis la voix ajouta, toujours moitié toussant, moitié renâclant : « Mais je te préviens d’une chose, mon bon ami… — son bon ami ! répéta mon guide avec rage… — je te préviens que le moindre cahot me fait un mal affreux ; je suis à moitié mort des horribles soubresauts que ton misérable camarade m’a fait faire. Je veux aller très-doucement, très-doucement, au tout petit trot, entends-tu ? … car… — et il toussa comme s’il allait rendre l’âme, — car la plus petite secousse me tuerait… et je ne paye que le tarif… vingt-cinq sous de guides, mon bon ami… » Et là-dessus