Page:Sue - Kernok le pirate, extrait de Le Roman no 697-706, 1880.djvu/88

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sur chaque mot et en gonflant ses joues.

Il voulait dire une combustion instantanée, solution exacte et vraie de la mort de Kernok, donnée par un médecin de Quimper, fort habile homme, qu’on avait mandé un peu tard.

« Et ça ne vous fait pas trembler, monsieur Durand ? » dit Grain-de-Sel, qui voyait avec peine l’ex-canonnier-chirurgien-charpentier prendre la même direction que son défunt capitaine.

« Moi, c’est bien différent, mon garçon, je coupe mon eau-de-vie avec du vin, et il la buvait pure, le vieux lascar.

— Ah !… répondit Grain-de-Sel, peu convaincu de la tempérance de M. Durand.

— Tiens, dit celui-ci, en voilà un qui mourra dans la peau d’un voleur, si on ne l’écorche pas tout vif. » Et il montrait un grand homme sec et mince, à uniforme bleu, brodé d’argent, qui traversait la place.

« Que je voudrais être à bord avec ce chien de Plik, lui les bras attachés à une échelle de hauban, le dos nu… et moi une bonne garcette à la main !

Quand je pense que pour avoir passé par les mains de ce gueux de commissaire, nos parts de prise ont diminué de neuf dixièmes ; qu’au lieu d’avoir les soixante mille francs qui me font vivre depuis vingt ans, je devrais peut-être avoir un million, et que ce pauvre vieux Kernok n’a eu en tout que deux cent mille francs sur les tonnes d’argent qui nous revenaient du trois-mâts espagnol !

— Bah ! reprit Grain-de-Sel, un peu plus, un peu moins. J’ai tout de même été bien content de quitter le métier avec