Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 1-2.djvu/425

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Pendant une seconde, malgré le fracas de la tempête, malgré l’approche du naufrage, les regards de ces trois êtres se rencontrèrent…

Les traits du jeune homme exprimèrent alors une commisération subite, profonde ; car les deux jeunes filles, les mains jointes, l’imploraient comme un sauveur attendu…

Le vieillard, renversé par la chute d’un bordage, gisait sur le pont.

Bientôt tout disparut.

Une effrayante masse d’eau lança impétueusement le Black-Eagle sur le Guillaume-Tell au milieu d’un nuage d’écume bouillonnante.

À l’effroyable écrasement de ces deux masses de bois et de fer qui, broyées l’une contre l’autre, sombrèrent aussitôt, se joignit seulement un grand cri…

Un cri d’agonie et de mort !

Un seul cri poussé par cent créatures humaines s’abîmant à la fois dans les flots !…

Et puis l’on ne vit plus rien…

Quelques moments après, dans le creux ou sur la cime des vagues… on put apercevoir les débris des deux bâtiments, et çà et là, les bras crispés, la figure livide et désespérée de quelques malheureux tâchant de gagner les récifs de la côte, au risque d’y être écrasés sous le choc des lames qui s’y brisaient avec fureur.