Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 3-4.djvu/121

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— Voyons, ma chère demoiselle Adrienne, dit M. Baleinier d’une voix onctueuse et pénétrante, calmez-vous… tout ceci est passé… vous avez en moi un ami dévoué…

Et cet homme, en disant ces mots, rougit malgré son astuce diabolique.

— Je le sais, vous êtes mon ami, dit Adrienne, je n’oublierai jamais que vous vous êtes exposé aujourd’hui aux ressentiments de ma tante en prenant mon parti, car je n’ignore pas qu’elle est puissante… oh ! bien puissante pour le mal…

— Quant à cela… dit le docteur en affectant une profonde indifférence, nous autres médecins… nous sommes à l’abri de bien des rancunes…

— Ah ! mon cher M. Baleinier, c’est que madame de Saint-Dizier et ses amis ne pardonnent guère ! (Et la jeune fille frissonna.) Il a fallu mon invincible aversion, mon horreur innée de tout ce qui est lâche, perfide et méchant, pour m’amener à rompre si ouvertement avec elle… Mais il s’agirait… que vous dirai-je ?… de la mort… que je n’hésiterais pas… et pourtant, ajouta-t-elle avec un de ces gracieux sourires qui donnaient tant de charme à sa ravissante physionomie, j’aime bien la vie… et si j’ai un reproche à me faire… c’est de l’aimer