Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 3-4.djvu/539

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rue Brise-Miche, avaient à peine échangé quelques paroles. Le but de ces deux hommes de cœur était noble, généreux, et pourtant résolus, mais pensifs, ils se glissaient dans l’ombre comme des bandits à l’heure des crimes nocturnes.

Agricol portait sur ses épaules un sac renfermant la corde, le crochet et la barre de fer ; Dagobert s’appuyait sur le bras de son fils, et Rabat-Joie suivait son maître.

— Le banc où nous nous sommes assis tantôt doit être par ici, dit Dagobert en s’arrêtant.

— Oui, dit Agricol en cherchant des yeux, le voilà, mon père.

— Il n’est que onze heures et demie, il faut attendre minuit, reprit Dagobert. Asseyons-nous un instant pour nous reposer et convenir de nos faits…

Au bout d’un moment de silence, le soldat reprit avec émotion, en serrant les mains de son fils dans les siennes :

— Agricol, mon enfant… il en est temps encore… je t’en supplie… laisse-moi aller seul… je saurai bien me tirer d’affaire ;… plus le moment approche… plus je crains de te compromettre dans cette entreprise dangereuse.