Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 3-4.djvu/62

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suis fait aucune idée juste ou fausse, car je n’y ai jamais songé.

— C’est ma faute ; j’aurais dû, au lieu de condescendre à vos fantaisies, vous faire sentir plus rudement mon autorité ; mais le moment est venu de vous soumettre ; le blâme sévère de mes amis m’a éclairée à temps… votre caractère est entier, indépendant, résolu ; il faut qu’il change, entendez-vous ? et il changera, de gré ou de force, c’est moi qui vous le dis.

À ces mots, prononcés aigrement devant des étrangers, et dont rien ne semblait autoriser la dureté, Adrienne releva fièrement la tête ; mais, se contenant, elle reprit en souriant :

— Vous dites, ma tante, que je changerai ; cela ne m’étonnerait pas… On a vu des conversions… si bizarres.

La princesse se mordit les lèvres.

— Une conversion sincère… n’est jamais bizarre, ainsi que vous l’appelez, mademoiselle, dit froidement l’abbé d’Aigrigny ; mais au contraire, très-méritoire et d’un excellent exemple.

— Excellent ? reprit Adrienne ; c’est selon ;… car enfin, si l’on convertit ses défauts… en vices…

— Que voulez-vous dire, mademoiselle ? s’écria la princesse.