Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 5-6.djvu/122

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Quant à toi, mon brave enfant, je n’espérais pas te voir ici, croyant qu’on t’aurait empêché, ainsi que les autres, de t’y trouver ce matin ; mais, Dieu merci, tu es là… et j’arrive à temps ; je ne suis pas venu plus tôt à cause de ma blessure. J’ai tant perdu de sang que j’ai eu, toute la matinée, des défaillances.

— En effet, s’écria Gabriel avec inquiétude, je n’avais pas remarqué votre bras en écharpe… Cette blessure, quelle est-elle ?

À un signe d’Agricol, Dagobert reprit :

— Ce n’est rien… la suite d’une chute… Mais me voilà… et bien des infamies vont se dévoiler…

Il est impossible de peindre la curiosité, les angoisses, la surprise ou les craintes des différents acteurs de cette scène en entendant ces menaçantes paroles de Dagobert.

Mais, de tous, le plus atterré était Gabriel. Son angélique figure se bouleversait, ses genoux tremblaient. Foudroyé par la révélation de Dagobert, apprenant ainsi l’existence d’autres héritiers, pendant quelques minutes, il ne put prononcer une parole ; enfin il s’écria d’une voix déchirante :

— Et c’est moi… mon Dieu… c’est moi… qui suis cause de la spoliation de cette famille !…

— Toi ! mon frère ? s’écria Agricol.