Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 5-6.djvu/330

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chée de l’attention de mademoiselle de Cardoville qu’elle ne l’eût peut-être été d’un service rendu.

— Regardez-la… monsieur, dit Adrienne à Rodin, qui se rapprocha vivement. Oui…, ajouta la jeune patricienne avec fierté… c’est un trésor que j’ai découvert… Regardez-la, monsieur, et aimez-la comme je l’aime, honorez-la comme je l’honore. C’est un de ces cœurs… comme nous les cherchons.

— Et comme nous les trouvons, Dieu merci, ma chère demoiselle, dit Rodin à Adrienne en s’inclinant devant l’ouvrière.

Celle-ci leva lentement les yeux sur le jésuite ; à l’aspect de cette figure cadavéreuse qui lui souriait avec bénignité, la jeune fille tressaillit. Chose étrange ! elle n’avait jamais vu cet homme, et instantanément elle éprouva pour lui presque la même impression de crainte, d’éloignement, qu’il venait de ressentir pour elle. Ordinairement timide et confuse, la Mayeux ne pouvait détacher son regard de celui de Rodin ; son cœur battait avec force, ainsi qu’à l’approche d’un grand péril, et comme l’excellente créature ne craignait que pour ceux qu’elle aimait, elle se rapprocha involontairement d’Adrienne, tenant toujours ses yeux attachés sur Rodin.