Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 7-8.djvu/252

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comme l’a dit un de ces messieurs, s’introduire le goulot d’une bouteille d’eau-de-vie entre les dents est peut-être encore plus dangereux que de s’y insinuer le canon d’un pistolet chargé, et…

— Commandez le feu… mon vieux, dit Jacques en interrompant Nini-Moulin, ou je le commande moi-même.

— Puisque vous le voulez… soit.

— Le premier qui renonce est vaincu, dit Jacques.

— C’est convenu, répondit Morok.

— Allons, messieurs, attention… et jugeons les coups, c’est le cas de le dire, reprit Nini-Moulin ; mais voyons d’abord si les bouteilles sont pareilles ;… avant tout, l’égalité des armes.

Pendant ces préparatifs, un profond silence régnait dans la salle.

Le moral de la plupart des assistants, un moment remonté par l’arrivée du punch, retombait de nouveau sous le poids de tristes préoccupations, on pressentait vaguement le danger du défi porté par Morok à Jacques. Cette impression, jointe aux sinistres pensées éveillées par l’incident du cercueil, assombrissait plus ou moins les physionomies. Cependant plusieurs convives faisaient encore bonne contenance ; mais leur gaieté paraissait forcée.