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Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 7-8.djvu/323

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Précieuse imagination que cette sainte hôtellerie où les aliments corporels et spirituels étaient aussi appétissants que délicatement choisis et servis, où l’on se restaurait l’âme et le corps à tant par tête, où l’on pouvait faire gras le vendredi en toute sécurité de conscience moyennant une dispense de Rome, pieusement portée sur la carte à payer, immédiatement après le café et l’eau-de-vie. Aussi disons-le à la louange de la profonde habileté financière des révérends pères et à leur insinuante dextérité, la pratique abondait.

Et comment n’aurait-elle pas abondé ? le gibier était faisandé avec tant d’à-propos, la route du paradis si facile, la marée si fraîche, la rude voie du salut si bien déblayée d’épines et si gentiment sablée de sable couleur de rose, les primeurs si abondantes, les pénitences si légères, sans compter les excellents saucissons d’Italie et les indulgences du saint-père qui arrivaient directement de Rome, et de première main, et de premier choix, s’il vous plaît.

Quelles tables d’hôte auraient pu affronter une telle concurrence ? On trouvait dans cette calme, grasse et opulente retraite tant d’accommodements avec le ciel ! Pour bon nombre de gens à la fois riches et dévots, crain-