Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 7-8.djvu/556

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pour toujours aux yeux de mademoiselle de Cardoville… Voyons, dis : cette haine acharnée… pourquoi ? Encore une fois… que t’ai-je fait ?

— Monseigneur… vous me jugez mal, et je…

— Écoute-moi, je ne veux plus que tu sois méchant et traître ; je veux te rendre bon… Dans notre pays, on charme les serpents les plus dangereux, on apprivoise les tigres… Eh bien ! je veux aussi te dompter à force de douceur, toi qui es un homme… toi qui as un esprit pour te guider et un cœur pour aimer ;… ce jour me donne un bonheur divin, tu béniras ce jour… Que puis-je pour toi ? que veux-tu ? de l’or ?… tu auras de l’or… Veux-tu plus que de l’or ?… veux-tu un ami, dont l’amitié tendre te consolera, et, te faisant oublier les chagrins qui t’ont rendu méchant, te rendra bon ?… Quoique fils de roi, veux-tu que je sois cet ami ? Je le serai, oui… malgré le mal… non… à cause du mal que tu m’as fait ;… je serai pour toi un ami sincère, heureux de me dire : Le jour où l’ange m’a dit qu’elle aimait, mon bonheur a été bien grand : le matin j’avais un ennemi implacable ; le soir, sa haine s’était changée en amitié… Va, crois-moi, Faringhea, le malheur fait les méchants ; le bonheur fait les bons : sois heureux…

À ce moment, deux heures sonnèrent.